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Repenser la santé publique

Repenser la santé publique

Par Sume Ndumbe-Eyoh Sume Ndumbe-Eyoh Sur 21 juillet 2015

Qu’entend-on par « repenser la santé publique »? La question a constitué le thème du congrès annuel tenu par l’Association of Local Public Health Agencies (alPHa) de l’Ontario en juin 2015.

En matinée, les panélistes ont abordé les perspectives locales, provinciales, territoriales, nationales et internationales se rattachant aux tendances en santé publique. J’ai trouvé les commentaires du Dr Peter Donnelly, président-directeur général de Santé publique Ontario, particulièrement intéressants. Il a discuté de trois grandes tendances observées sur la scène internationale :

  • un leadership au sein de disciplines plus variées que celui exercé actuellement en santé publique au Canada;
  • une plus grande propension à accepter et à intégrer des méthodes de recherche polyvalentes et qualitatives;
  • une plus grande importance accordée au transfert des connaissances parmi les chercheurs, les responsables de l’élaboration des politiques et d’autres intervenants.

Au chapitre de la mondialisation, le Dr Donnelly a rappelé qu’il ne s’agissait pas là d’un phénomène nouveau. Il s’est servi de l’exemple de l’industrie cotonnière en Amérique où la croissance s’est effectuée au prix de l’appropriation des terres autochtones, du travail forcé d’esclaves africains et du travail des enfants dans les manufactures. Il a pressé les intervenants de la santé publique de s’efforcer de comprendre les effets désastreux de la mondialisation sur la santé et d’agir sur trois plans :

  • l’Ontario devrait admettre qu’elle n’est pas seule au monde et s’ouvrir aux discussions d’envergure internationale;
  • il faut placer la justice sociale au cœur de la démarche de santé publique;
  • il importe d’investir dans la petite enfance.

Dans une autre séance, le Dr Jeff Turnbull, de Qualité des services de santé Ontario, a souligné que l’équité en santé constitue une dimension cruciale de la qualité, même si la notion n’est pas tout à fait intégrée pour le moment. En évoquant la carte de pointage du National Health Services (R.-U.) en matière d’équité, le Dr Turnbull a fait observer qu’il serait sans doute intéressant de prévoir dans le Programme commun d’amélioration de la qualité de son organisme des mesures (c.-à-d. indicateurs) relatives au revenu, à la pauvreté, au genre, à l’ethnie et à d’autres déterminants sociaux de la santé.

Pour sa part, le Dr Doug Manuel a signalé que les intervenants de la santé publique ne devraient pas hésiter à procéder à l’analyse du rendement du capital investi (RCI) puisque l’exercice mettrait en lumière les forces de la santé publique. La plupart des personnes présentes dans la salle abondaient dans le même sens. Le Dr  Manuel est allé encore plus loin en soulignant l’importance de relier l’analyse à l’étendue de l’intervention. Il faut considérer les éléments à mesurer, la mesure dans laquelle il est possible de les mesurer avec précision et la quantité de temps à y consacrer considérée comme étant raisonnable.

J’ai pris la parole aux côtés du Dr Ronald Labonté, l’un des pionniers en matière de promotion de la santé. Le Dr Labonté a parlé en premier des cinq rôles que peut jouer la santé publique en matière de déterminants sociaux de la santé :

  • éducateur/chien de garde
  • courtier des ressources;
  • spécialiste en développement communautaire;
  • spécialiste en établissement de partenariats;
  • spécialiste du plaidoyer et catalyseur (le document en anglais)

Quant à moi, j’ai souligné le rôle catalysant des compétences et du leadership organisationnels dans la démarche pour l’équité en santé publique. Les leaders de la santé publique sont bien placés pour créer un espace propice à l’action. Pour les employeurs et les institutions publiques, il importe avant tout de se livrer à une introspection et d’examiner l’ensemble des pratiques et des politiques dans le domaine de la santé publique, puis de s’interroger sur la manière dont est véhiculée la notion de l’équité dans l’ADN des organismes. Si nous voulons renforcer l’équité en santé, nous devons placer les valeurs d’équité et de justice sociale au cœur de tout processus décisionnel. Ce genre de démarche pose problème, mais se révèle essentielle pour s’attaquer aux iniquités à la source. En outre, il faut absolument se demander comment survient et se reproduit le déséquilibre du pouvoir. S’il y a une chose que je retiens de cette journée, c’est que la santé publique a tous les atouts pour relever le défi.

Balises

Leadership et renforcement des capacités