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Symposium: Décoloniser nos relations grâce à la bienveillance latérale

Symposium: Décoloniser nos relations grâce à la bienveillance latérale

Par Karen Fish , Jaime Stief Jaime Stief Sur - le 15 septembre 2017

Le présent blogue fait partie d’une série de trois textes sur la santé autochtone et l’application des connaissances autochtones. L’idée a émergé de la participation du CCNDS à la conférence annuelle Santé publique 2017 qui s’est tenue à Halifax (N.-É.), en juin dernier. L’objectif est d’affermir les efforts du CCNDS à se comporter comme un organisme antiraciste.

L’une des auteures du blogue, Karen Fish, est une femme blanche non autochtone vivant à Antigonish, (N.-É.), à Mi’kma’ki, sur les terres ancestrales et non cédées du peuple micmac. Au fil de sa carrière, Karen a effectué de la recherche, de la rédaction et de la révision dans les domaines de la santé et des sciences et des enjeux de société.

L’autre auteure du blogue, Jaime Stief, est une femme blanche non autochtone vivant à Waterloo, (Ontario), le territoire traditionnel des Neutres, des Anishinaabe et des Haudenosaunee. Le parcours professionnel de Jaime l’a amenée à faire de la rédaction et de la révision linguistique à des fins de publication papier ou numérique.

En juin 2017, Karen Fish a eu le plaisir de participer au symposium qui a fait l’objet de nombreux éloges et qui était organisé par la First Nations Health Directors Association (FNHDA) (en anglais) dans le cadre de la conférence annuelle Santé publique 2017 qui s’est tenue à Halifax (N.-É.), à Mi’kma’ki, sur les terres ancestrales et non cédées du peuple micmac.

Titre du Symposium : Décoloniser nos relations grâce à la bienveillance latérale

Animatrice : Kim Brooks, chef de service, Squamish Nation Yúustway Health Services, et présidente du conseil d’administration de la FNHDA

Présentatrices :

  • Shannon MacDonald, médecin hygiéniste en chef adjointe, First Nations Health Authority (FNHA)
  • Emmy Manson, conseillère régionale en bien-être mental, FNHA
  • Virginia Peters, aînée conseillère par intérim, FNHDA

Le Sympositum visait à présenter les concepts de violence latérale et de bienveillance latérale et à définir les stratégies propres à appliquer la bienveillance latérale dans de multiples contextes.

Comprendre la violence latérale

Le concept de violence latérale était au cœur des objectifs du symposium de la FNHDA. Le groupe de spécialistes autochtones a décrit le concept en expliquant que la violence latérale appauvrit l’une et l’autre des parties parce que les deux projettent leur colère et leur instatisfaction sur l’autre. La source de la violence latérale chez les peuples autochtones est complexe et étroitement liée à la colonisation, au racisme et aux traumatismes intergénérationnels vécus par les collectivités autochtones. Dans un document publié en 2014 par la Fondation autochtone de guérison, les auteures parlent de la mesure dans laquelle les pensionnats ont contribué à la violence latérale. Elles expliquent : « [c]omme c’est souvent le cas chez les populations opprimées, il n’est pas étonnant que nous opprimions les nôtres en nous laissant dominer par la colère et la frustration. » (Bombay, 2014).

Tout comme le racisme, la violence latérale peut se manifester sur divers plans : personnel, institutionnel et structurel. (Pour approfondir le sujet, nous recommandons le document intitulé Comprendre le racisme publié par le Centre de collaboration nationale de la santé autochtone). Dans les collectivités autochtones, comme dans les autres, le phénomène prend place à la maison, en milieu de travail et dans l’arène politique. Sur le plan personnel — l’une des principales dimensions abordées lors du symposium — la violence latérale s’exprime de l’une ou l’autre des façons suivantes :

  • intimidation non verbale (froncer les sourcils, faire des grimaces, lever les yeux au ciel)
  • injures ou insultes évidentes
  • sarcasmes méprisants, commentaires narquois et rebuffades
  • accusations
  • invention ou exagération de scénarios
  • blagues offensives par courriel ou de vive voix
  • humiliations
  • exclusion, ostracisme, désintérêt, indifférence

Comme l’ont expliqué les présentatrices, les effets secondaires de la violence latérale dans les collectivités autochtones vont de la perte de sommeil et de poids, à la prise de poids, à l’angoisse, à un sentiment de ne rien valoir, et même à la dépression. Bref, la violence latérale nuit à la santé des peuples autochtones.

Les présentatrices Shannon MacDonald et Emmy Manson, qui parlaient au nom de la FNHA, ont décrit comme suit l’effort général déployé par leur organisme pour combattre la violence latérale, comme il est énoncé dans la section 3.6 de sa politique pour un milieu de travail respectueux (en anglais) :

La FNHA ne tolérera aucune « violence latérale » sur les lieux de travail. Les membres du personnel de la FNHA s’appuient mutuellement en tant que groupe. Ils réagiront à toute forme de violence latérale en y opposant les valeurs organisationnelles de respect, d’équité et d’importance de la création de liens pour établir un milieu de travail empreint de bienveillance. Ils chercheront à substituer des gestes de bienveillance à toute expression de violence latérale, peu en importe la forme. [Traduction libre]

Mise en place pour combattre la violence latérale sur le plan institutionnel, la politique accorde la priorité à « un milieu de travail sain et sécuritaire », tout comme ses lignes directrices en matière d’accès à l’information et ses politiques concernant le conseil d’administration.

Introduction de la bienveillance latérale

C’est devant les dommages causés par la violence latérale chez les peuples autochtones qu’a émergé le concept de bienveillance latérale qui repose sur les valeurs autochtones d’harmonie sociale et de relations saines.

Emmy Manson, de la FNHA, a défini la bienveillance latérale en termes tout simples : « c’est se soutenir mutuellement. » Au lieu de se concentrer sur les comportements et les problèmes négatifs, la bienveillance latérale applaudit les comportements positifs des autres, même les plus petits. Il s’agit d’un modèle qui favorise le soutien et l’encouragement des individus, et que le FNHC cherche à intégrer dans ses pratiques.

Dans un bulletin publié en 2016 par la FNHA qui comportait la description des démarches de l’organisme au chapitre de la bienveillance latérale, on fait référence à la FNHDA comme d’une championne en la matière. On peut en voir un exemple dans le site Web de la FNHDA. Dans le profil biographique de Kelowa Edel, la directrice de la santé de la Nation Stó:lō (en anglais), on souligne l’engagement de Kelowa envers la bienveillance latérale en ces termes explicites : 

Kelowa pratique la bienveillance latérale en ne sautant jamais aux conclusions et en ne prenant jamais rien de façon personnelle. Elle vérifie tout, essaie d’utiliser des mots irréprochables et cherche toujours à se comporter avec les gens de la même manière qu’elle voudrait que les autres se comportent avec elle.

Le profil de Kelowa fait ressortir l’empathie qui transpire dans son travail, une qualité de première importance dans le combat contre la violence latérale sur le plan personnel.

Étapes pour l’avenir

La détermination à institutionnaliser la bienveillance latérale – et, par le fait même, à désinstitutionnaliser la violence latérale – reflète l’effort mis pour atténuer les effets de la colonisation dans les collectivités et les relations autochtones. Les présentatrices se sont fait un point d’honneur de discuter du contenu d’un document publié en 2014 par la FNHDA afin de faciliter une telle démarche. Il s’agit du Position Statement: A Call to Action towards a zero tolerance of lateral violence (déclaration : un appel à l’action afin de parvenir à la tolérance zéro pour ce qui est de la violence latérale).

Dans le document de la FNHDA, les auteurs énoncent 13 mesures susceptibles d’aider à « assurer le mieux-être physique, spirituel, mental et affectif sur les plans individuel et collectif » [traduction libre]. Les étapes forment un modèle de guérison de la violence latérale et comportent des mesures dont voici quelques exemples :

  • s’appuyer sur les valeurs des Premières Nations pour induire des changements structurels dans la lutte contre la violence latérale;
  • encourager les personnes qui partagent les valeurs des Premières Nations à se rendre compte des effets dommageables de la colonisation, des injustices historiques et de la violence, et de la possibilité de transformer ces réalités en des occasions de grandir;
  • travailler avec des partenaires pour élaborer du matériel pédagogique axé sur les Premières Nations afin que les personnes qui partagent les valeurs des Premières Nations puissent comprendre l’influence de la violence latérale sur la santé et le bien-être.

Les travaux de la FNHA et de la FNHDA dans ce domaine sont une source d’inspiration. Ils montrent de quoi peuvent avoir l’air les prochaines étapes pour les autres personnes désireuses d’incarner la bienveillance latérale sur le plan organisationnel.

 

Travaux cités

Bombay, A., K. Matheson et H. Anisman. (2014). Origine de la violence latérale dans les collectivités autochtones. Fondation autochtone de guérison. Récupéré de www.ahf.ca/downloads/lateral-violence-french.pdf

First Nations Health Authority. (November 25, 2016). #Violencestopswithme: BC First Nations Commit to Ending Violence against Women and Girls. Site Web de la First Nations Health Authority : sous l’onglet News. Récupéré de www.fnha.ca/about/news-and-events/news/violencestopswithme-bc-first-nations-commit-to-ending-violence-against-women-and-girls

First Nations Health Directors Association. (2014). Position Statement: A Call to Action towards a zero tolerance of lateral violence. Récupéré de http://fnhda.ca/wp-content/uploads/2016/04/FNHDA-Lateral-Violence-Position-Statement.pdf (en anglais)

Centre de collaboration nationale de la santé autochtone. (2013). Comprendre le racisme. www.nccah-ccnsa.ca/Publications/Lists/Publications/Attachments/103/understadning_racism_FR_web.pdf

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