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Résilience face aux changements climatiques : la COVID-19 fait ressortir la nécessité de mettre un terme à l’iniquité

Résilience face aux changements climatiques : la COVID-19 fait ressortir la nécessité de mettre un terme à l’iniquité

Par Pemma Muzumdar (elle) Pemma Muzumdar (elle) Sur - 30 avril 2021

Le présent mémoire vise à montrer que notre expérience collective de la pandémie de COVID-19 fait ressortir l’urgence pour la santé publique d’agir et d’adapter sa démarche pour lutter contre le changement climatique. L’auteure fait état de certaines approches fondées sur l’équité pour lutter contre le changement climatique et bâtir des collectivités justes, durables et résilientes. Elle examine plus en profondeur quelques exemples concrets dans la suite intitulée : Résilience face aux changements climatiques – deuxième partie : rôles et démarches de la santé publique1.

 

Pour poser des questions, formuler des commentaires et faire part de vos expériences vécues sur le terrain, écrivez-nous au [email protected]. Pour connaître les autres ressources produites par le CCNDS sur le changement climatique et l’équité en santé, consultez la collection de ressources du CCNDS.

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Introduction

 

Il faudrait faire preuve d’une grande dissonance cognitive pour considérer la crise de COVID-19 comme n’ayant rien à voir avec la crise climatique qui nous guette, ou avec la crise plus générale causée par des décennies de mondialisation économique et de changement écologique, en parallèle2(p.1). (Traduction libre)

 

Le changement climatique s’avère une urgence sanitaire qui ne fait qu’exacerber les iniquités en matière de santé2-10.

 

Les scientifiques préviennent que, sans une intervention planétaire énergique d’ici la fin de la prochaine décennie, le réchauffement de la terre progressera jusqu’à franchir la barre du 1,5 °C11. Une telle situation se révélerait délétère pour la santé des gens et aussi de la planète. Ses corollaires que sont la chaleur extrême, l’élévation du niveau de la mer, la disparition de certaines espèces et la rupture des chaînes d’approvisionnement alimentaire mondiale s’en trouveraient aggravés d’autant9,11,12.

 

Or, les acteurs de la santé publique passent leur temps à « éteindre les feux » qui caractérisent leurs activités professionnelles quotidiennes – y compris pour stopper la pandémie de COVID-19. C’est pourquoi ils ne sont pas en mesure de consacrer suffisamment de temps à une crise mondiale qui se développe plus lentement.

Le présent mémoire a pour objet ce qui suit :

  1. reconnaître que le changement climatique est une urgence sanitaire ayant une grande incidence sur l’équité en santé;
  2. faire valoir que notre expérience collective de la pandémie de COVID-19 peut servir à mobiliser les acteurs de plusieurs milieux, dont la santé publique, autour de la lutte contre le changement climatique et l’iniquité sociale afin qu’ils agissent dans l’urgence en y consacrant les efforts voulus;
  3. proposer des ressources et formuler des recommandations concernant l’atténuation des iniquités, la transformation des systèmes et le renforcement de la capacité de résilience climatique.

 

Ressources connexes :

 

Tout comme le changement climatique, la COVID-19 amplifie l’iniquité.

 

Le changement climatique et la pandémie ont de nombreux points en commun quant à la nature de la menace : les deux sévissent partout sur la planète; les populations vulnérables portent une plus grande part du fardeau des effets; les deux entraînent une perturbation économique générale; ils affaiblissent la santé publique; ils sont des facteurs multiplicateurs de la menace et leur atténuation exige de solides données scientifiques afin d’orienter la prise de décision. Ces similitudes permettent d’en conclure qu’il faudrait aborder les deux un peu de la même manière4(p.9). (Traduction libre)

 

On sait que les personnes déjà en situation de défavorisation structurelle à cause du racisme, du colonialisme et des structures économiques injustes vivent de manière disproportionnée les effets corollaires de la pandémie de COVID-19 et des changements climatiques sur leur santé2-4,8,15.

 

Au-delà du risque de contracter la COVID-19 et d’en présenter des symptômes graves voire d’en mourir, la population canadienne fait face à l’isolement social, à des pertes d’emploi, à des problèmes de sécurité en milieu de travail, à la fermeture des écoles et des garderies et bien plus encore. Ce sont les personnes des groupes racisés et à faible revenu qui sont les plus vulnérables. Elles sont en effet plus susceptibles de travailler dans les services essentiels où il est impossible de respecter la distanciation sociale et de vivre dans des ménages intergénérationnels avec des membres de leur famille plus âgés et plus vulnérables15,16. Ce sont elles encore qui sont les plus susceptibles de vivre, de travailler et de jouer dans des endroits où la pollution atmosphérique est la pire3,17 et, par contrecoup, de subir les effets combinés d’une exposition à long terme à de la matière particulaire (caractéristique de la pollution atmosphérique) et de la mortalité de la COVID-194,17-21. Enfin, ce sont les personnes des groupes racisés et à faible revenu qui sont les moins susceptibles d’avoir accès à des espaces verts, à des congés de maladie payés, à des solutions de rechange pour la garde de leurs enfants en cas de fermeture des écoles et à des endroits où elles peuvent s’isoler en toute sécurité en cas d’exposition au virus15,16.

 

Ressources connexes :

 

La pandémie de COVID-19 poursuit ses effets délétères sur la santé et l’économie, tant à l’échelle locale qu’internationale. Pourtant, la situation ne se compare d’aucune façon avec ce qu’il adviendrait dans un monde de plus en plus chaud sur les plans de la santé, social et économique. La population vit déjà les contrecoups du changement climatique sur sa santé physique et mentale. Pensons par exemple aux incendies de forêt, aux inondations, à la pollution atmosphérique, aux épisodes de chaleur extrême, aux allergies, aux maladies transmises par les tiques et, dans le Nord du Canada, au réchauffement de l’Arctique et aux changements dans les sources d’aliments traditionnels23. Dans l’éventualité d’une accélération du réchauffement, on estime que la complexité de la situation serait telle que les conséquences seraient pires encore. Partout sur la planète, les populations seraient obligées d’affronter plusieurs crises en même temps, par exemple :

  • la multiplication des épisodes de conditions météorologiques exceptionnelles;
  • l’avènement de dommages aux infrastructures personnelles et publiques;
  • le déplacement de collectivités;
  • la détérioration des systèmes d’approvisionnement en aliments et en eau;
  • l’émergence et la ré-émergence de maladies infectieuses connues et nouvelles4,8.

 

Tout comme la pandémie de COVID-19, le changement climatique s’avère un agent multiplicateur des risques. Il influe de manière disproportionnée sur les personnes déjà en situation de défavorisation structurelle en raison de facteurs tels le racisme, le colonialisme et un faible revenu. Si les communautés autochtones du Nord du Canada continuent de ressentir les effets de la colonisation et des pensionnats sur leur santé, elles doivent en plus s’adapter à un milieu qui se réchauffe trois fois plus rapidement que dans le reste du Canada10,23. Les groupes de population à faible revenu ont vécu les effets des épisodes de chaleur extrême de manière disproportionnée parce qu’ils sont moins susceptibles d’avoir les moyens de se doter de climatisation et plus susceptibles de vivre dans les îlots de chaleur urbains des quartiers densément peuplés sans couvert forestier adéquat3,24. Qui plus est, les groupes à faible revenu et racisés s’exposent plus souvent à la pollution atmosphérique et aux maladies respiratoires corollaires3,25.

 

Ressources connexes :

 

L’ampleur de l’intervention pour stopper la pandémie de COVID-19 peut laisser espérer que nous sommes prêts à faire face au changement climatique.

 

Le degré de préparation n’est pas seulement un concept. C’est une capacité, un état de préparation. Quand on parle de changement climatique, on parle à la fois de prévention – faire tout en son pouvoir localement pour réduire les émissions de gaz à effet de serre – et de protection – prendre les mesures propres à réduire la vulnérabilité aux catastrophes naturelles28(p.13).

 

La pandémie de COVID-19 et la crise climatique constituent toutes deux des urgences sanitaires qui agissent sur plusieurs systèmes à la fois et qui frappent de manière disproportionnée les plus vulnérables. Cependant, les interventions pour y remédier sont très différentes. En raison de sa vitesse de propagation, de ses ravages et de ses effets perturbateurs sur les systèmes de santé, alimentaires et économiques, la COVID-19 est prise en charge dans l’urgence correspondant à sa gravité28. Des gouvernements de partout dans le monde ont déclaré l’état d’urgence, dégagé des fonds d’intervention spéciaux, annoncé et appliqué le confinement, convoqué des comités consultatifs et investi dans des projets de recherche, de collaboration et d’innovation scientifiques de même que dans l’élaboration, l’approbation, la production et la fourniture de vaccins en temps record. Au Canada, on a instauré de nouvelles politiques (p. ex. aide financière) et façons de fonctionner (p. ex. télétravail, réunions en vidéoconférence et téléconférences) avec une rapidité inouïe, confirmant ainsi l’importance de la volonté politique comme vecteur des grands changements systémiques.

 

En revanche, les gouvernements considèrent généralement la crise climatique imminente comme progressant lentement et ne constituant pas une menace sérieuse. Ils ne sont donc pas intervenus avec la rapidité ni l’envergure voulues pour éviter un réchauffement d’ampleur catastrophique, s’adapter à ce qui se dessine à l’horizon et atténuer les iniquités qui exacerbent la vulnérabilité et le risque liés au climat.

 

De nombreux secteurs et systèmes ont dû collaborer à la mise en place de l’intervention à grande échelle exigée par la pandémie de COVID-19. L’inégalité sociale et de la santé portée à l’avant-scène peut permettre d’espérer. Le fait qu’il soit possible d’intervenir et de changer à ce point influe sur les mesures que doit prendre le système dans son ensemble pour lutter contre le changement climatique et investir davantage en santé publique pour que ses acteurs puissent contribuer à la démarche.

 

L’expérience de la COVID-19 met en relief l’importance de se préparer à ce genre de choc à l’avenir.

 

La pandémie de COVID-19 a montré à quel point il était complexe de répondre à une crise mondiale de santé publique. Elle a mis en lumière le pouvoir de la collaboration et l’engagement des Canadiens qui se sont unis pour lutter contre le virus. Elle a aussi montré l’interdépendance de nos politiques et de nos mesures de soutien en matière de santé, de société et d’économie.

La façon dont ces secteurs travaillent ensemble, avec la participation de la société civile et des collectivités, influera sur notre succès contre la résurgence de la COVID-19, et aidera à atténuer les répercussions des urgences sanitaires futures. En tant que société, nous sommes à un tournant décisif. C’est en travaillant ensemble que nous pourrons passer du risque à la résilience15(p.65).

Dans son rapport annuel de 202015, l’administratrice en chef de la santé publique du Canada la Dre Theresa Tam soutient que l’adoption d’une approche axée sur l’équité en santé pour lutter contre la pandémie de COVID-19 renforcera la capacité de résilience qui se révélera nécessaire pour affronter de nouvelles urgences sanitaires à l’avenir. La Dre Tam propose trois grandes mesures interdépendantes pour mettre fin à l’iniquité et permettre au Canada d’absorber le choc et de se sortir de situations d’urgence susceptibles de survenir en santé publique. Ces trois mesures sont : 1) le leadership et la gouvernance afin de favoriser un changement structurel, 2) le recours à la cohésion sociale et 3) le renforcement de la capacité de la santé publique partout au Canada. La Dre Tam examine en outre de nouvelles façons de vivre et de travailler qui protégeraient la population du Canada en cas de nouvelles situations d’urgence. En voici des exemples :

  • Mesures en matière de déterminants structurels, sociaux et environnementaux de la santé. Il s’agit notamment de réduire la stigmatisation et la discrimination et de travailler dans les principaux domaines d’intervention suivants :
    • sécurité économique et emploi;
    • logement et cadre bâti;
    • systèmes de santé, d’éducation et de services sociaux;
    • durabilité de l’environnement.
  • Renforcement de l’infrastructure, comme suit :
    • collecte et utilisation des données;
    • solide engagement envers les collectivités et travail intersectoriel dans une démarche de bonne gouvernance;
    • communication et coordination sur tous les plans.

Les recommandations de l’administratrice en chef de la santé publique du Canada font écho à la capacité de résilience à bâtir pour faire face au changement climatique, la « plus grande menace pour la santé dans le monde au xxie siècle29 ».

Une société résiliente face au climat, c’est une société dans laquelle les individus, les collectivités et les systèmes peuvent se transformer afin « d’avancer » vers une nouvelle normalité encore meilleure où tout le monde pourra se réaliser4,22.

Recommandations en matière de transformation et de résilience

Pour faciliter le rétablissement de la pandémie de COVID-19 et se préparer à affronter les répercussions du changement climatique sur la santé, les acteurs de la santé publique peuvent s’appuyer sur d’autres recommandations visant l’élimination de l’iniquité, la promotion de la durabilité et le renforcement de la résilience. En voici quelques exemples :

 

  • Dans le texte intitulé A radical revision of the public health response to environmental crisis in a warming world: Contributions of Indigenous knowledges and Indigenous feminist perspectives6, les auteurs expliquent « en quoi les politiques et le discours de la santé publique laissent sur le carreau les peuples autochtones vivant dans les États-nations coloniaux du Canada et d’Aotearoa (la Nouvelle-Zélande6 (p.1)) ». Ils établissent un lien étroit entre les pratiques et systèmes coloniaux et les circonstances ayant mené au changement climatique anthropique (causé par l’être humain). Ils font observer que, pour les peuples autochtones, les effets du changement climatique s’inscrivent dans la continuité et l’intensification de la colonisation. Les auteurs donnent l’exemple du rejet des connaissances très pertinentes des Autochtones, y compris les recherches et le leadership des femmes autochtones, dans les travaux de recherche et les interventions en matière de changement climatique. Ils insistent sur la nécessité d’accorder dorénavant une place centrale aux connaissances des Autochtones, qui sont fondées sur les relations de cause à effet entre les individus et la nature. En plaidant tant pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre que pour la décolonisation de la santé publique, les auteurs soulignent la nécessité de transformer les systèmes de manière à déstructurer et à revoir les conceptualisations dominantes concernant les déterminants sociaux de la santé, les déterminants écologiques de la santé et les compétences essentielles en santé publique.

 

  • Le Lancet Countdown sur la santé et les changements climatiques : compte rendu à l’intention du Canada3 publié en 2020 traite principalement de chaleur extrême et de pollution atmosphérique. Il comporte des recommandations pour assurer un rétablissement sain, équitable et écologique de la COVID-19. Les auteurs insistent pour dire que le « Canada doit absolument développer la résilience, l’équité et la solidarité entre les groupes, en donnant priorité aux Autochtones et aux communautés les plus vulnérables3(p.7) ». Ils adressent les recommandations suivantes aux responsables des politiques :
    • moderniser les infrastructures existantes et aménager les villes de manière à protéger les groupes à risque;
    • s’appuyer sur les stratégies d’adaptation utilisées par les Autochtones sur leurs terres;
    • soutenir le logement durable;
    • subventionner les initiatives de transport en commun et de transport actif, et cibler les groupes de population marginalisés qui en bénéficieront le plus;
    • renforcer la capacité de résilience du système de santé face au changement climatique;
    • promouvoir un rétablissement sain de la COVID-19, y compris :
      • une transition vers une société équitable et carboneutre,
      • l’application de la perspective de la justice dans toutes les politiques de lutte contre la crise climatique et de lutte contre la crise de COVID-19,
      • la collaboration avec les groupes de population marginalisés et touchés de manière disproportionnée.

 

  • Dans le livre en anglais Climate of crisis : How cities can use climate action to close the equity gap, drive economic recovery, and improve public health4, les auteurs examinent le comportement à adopter par les villes relativement au stress causé par la COVID-19, la récession économique, les protestations sociales devant la violence raciale et la nécessité d’agir en matière de changement climatique. Ils pressent les acteurs locaux de s’occuper du changement climatique avec le même empressement que pour la pandémie. Ils recommandent aux décisionnaires de faire de l’équité une priorité afin de créer des villes résilientes. Ils recommandent aussi de partager le pouvoir avec les groupes de population marginalisés en appliquant des modèles de gouvernance collaborative et une vision globale des systèmes au lieu d’une vision en silos comme par le passé (p. ex. parcs, équité raciale, logement, climat, préparation aux situations d’urgence, santé). Les auteurs énumèrent les secteurs d’intervention à privilégier, en conseillant aux parties prenantes des villes ce qui suit :
    • combler le fossé numérique séparant les populations socialement vulnérables;
    • assurer l’accès à des aliments sains et abordables;
    • investir dans un développement urbain favorisant la marche, le vélo, le logement abordable, le transport en commun et l’accès à l’emploi et aux services localement;
    • passer à l’énergie verte;
    • évaluer les nombreux avantages des espaces verts, promouvoir les initiatives vertes et éviter l’embourgeoisement au nom de l’écologie (c.-à-d. l’emménagement des riches dans des quartiers nouvellement reverdis, provoquant la hausse du prix du logement et forçant ainsi souvent les occupants de longue date de déménager);
    • réduire les déchets plastiques et communiquer les effets de ces déchets pour la santé;
    • s’occuper des répercussions de l’augmentation du télétravail (travailler de la maison) sur l’équité en santé;
    • prioriser l’équité dans le processus de rétablissement de la pandémie de COVID-19 et le plan de lutte contre le changement climatique (p. ex. équité raciale dans l’élaboration et la mise en œuvre des politiques; salaire suffisant pour tout le monde; diminution de l’exposition des groupes racisés à la pollution atmosphérique, à la chaleur extrême et aux dépôts de déchets dangereux).

 

  • Dans le Schéma directeur des Nations Unies en matière de recherche pour le redressement post-pandémique30, on reconnaît l’interdépendance entre les individus, les systèmes et les générations et la nécessité d’accorder la priorité à l’équité, à la résilience et à la durabilité dans le processus de rétablissement de la pandémie de COVID-19. Le schéma directeur comporte un cadre d’analyse et l’information nécessaire à l’édification d’un monde meilleur après la COVID-19, y compris en ce qui a trait à la préparation et à l’adaptation au changement climatique. Une série de questions de recherche est présentée afin d’aider à déterminer les meilleures façons de s’attaquer aux causes profondes des iniquités en matière de santé, de renforcer la cohésion sociale, de protéger les systèmes interdépendants des chocs durant une crise sanitaire et d’investir dans les collectivités en santé. Prises ensemble, les questions « mettent en lumière la nécessité de faire converger la recherche vers l’égalité des genres et la mobilisation des groupes marginalisés, d’assurer des emplois décents, de prévenir le fossé numérique, de relever les défis intersectoriels de “One Health/Un monde, une santé” et d’orienter les réformes de la gouvernance mondiale30(p.9) ».

 

  • Dans le texte en anglais Preparing for the future of public health: Ecological determinants of health and the call for an eco-social approach to public health education31, les auteurs recommandent que les personnes travaillant en santé publique apprennent dès leur formation à réfléchir et à agir différemment afin de se préparer à l’avènement d’un monde caractérisé par des changements écologiques majeurs, y compris le changement climatique. Ils soutiennent ainsi qu’il faut enseigner à conceptualiser la santé de manière holistique et à apprendre des connaissances des communautés autochtones, particulièrement en ce qui a trait aux interactions entre les facteurs écologiques, sociaux et économiques ayant une influence sur la santé. Les auteurs insistent sur l’importance du changement transformateur :

Devant la montée de l’incertitude et l’accélération du changement, la résilience suppose non seulement d’être capable de se relever, mais surtout d’accueillir le changement et d’avancer en adoptant de nouvelles façons de voir et de faire les choses (ce que certains appellent la transilience ou la transformation par la résilience – appelée en anglais transformative resilience), qui font appel à des processus de changement profondément collaboratifs et émergents, non pas au commandement et au contrôle31(p.63). (Traduction libre)

  • Dans le document Mesurer ce qui compte en plein cœur de la pandémie de COVID-19 : indicateurs d’équité pour la santé publique32, les auteures recommandent de mesurer la capacité de résilience et le degré de préparation aux situations d’urgence en tenant davantage compte de l’équité. Elles ajoutent à un cadre conceptuel déjà existant – un outil permettant de considérer chaque situation d’urgence comme ayant lieu dans un système adaptatif complexe – des précisions, ou des questions, concernant les 67 indicateurs. Chaque question invite les acteurs du système de santé à considérer l’iniquité et la défavorisation à chaque étape du processus de préparation, d’intervention et de rétablissement lors de situations d’urgence. Les acteurs de la santé publique pourraient se poser les mêmes questions afin de déterminer leur degré de préparation aux nombreuses urgences sanitaires – et souvent convergentes – associées au changement climatique, y compris les incendies de forêt, les inondations, les épisodes de chaleur extrême, les maladies infectieuses, l’augmentation de la pollution atmosphérique et ainsi de suite.

 

  • Le guide en anglais Framework for collaborative action on health and climate change33 est né de l’idée de minimiser les émissions de gaz à effet de serre, de s’adapter au changement, de créer des communautés résilientes et de travailler ensemble à la transformation des systèmes sociaux et économiques pour assurer une meilleure équité. Les principes directeurs du cadre d’action englobent – sans s’y limiter – les droits des Autochtones et la réconciliation, la prise en compte des systèmes dans leur globalité et la préférence pour les mesures ayant des effets bénéfiques dans plusieurs domaines à la fois (p. ex., rendre le territoire des villes plus propice à la marche). Le guide explique en détail huit champs d’action et la marche à suivre pour les mettre en application. Par exemple, pour le champ d’action lié à l’importance de l’inclusion, de l’équité en santé et de la justice climatique, la question suivante est posée : Comment serait-il possible de répondre au changement climatique en transformant les systèmes économiques et sociaux de manière à améliorer l’équité, la justice et la qualité de vie pour tout le monde (p.18)? On donne des suggestions relativement au travail collaboratif à faire, par exemple mener une évaluation de la vulnérabilité en matière de santé et de changement climatique en mettant l’accent sur l’équité et prendre en compte la perspective de l’équité dans les politiques d’adaptation au changement climatique.

 

  • Les auteurs du manuel en anglais Making equity real in climate adaptation and community resilience policies and programs: A guidebook34 décrivent une série de moyens d’opérationnaliser l’équité en santé dans les politiques et les programmes d’adaptation au changement climatique, en illustrant leurs propos de nombreux exemples concrets. Ils guident les utilisateurs à considérer les systèmes injustes qui peuvent exacerber la vulnérabilité liée au climat et à suivre les quatre étapes d’application de l’équité dans les activités d’adaptation au changement climatique, c’est-à-dire :
  1. inscrire l’équité dans les énoncés de mission, de vision et des valeurs ou dans les politiques et programmes;
  2. faire activement participer la population locale et inscrire l’équité à chaque étape du processus d’élaboration et de mise en œuvre;
  3. veiller à ce que la mise en œuvre d’une politique ou d’un programme améliore l’équité;
  4. faire périodiquement une évaluation axée sur l’équité afin d’orienter les efforts déployés.

L’une des auteurs du manuel, Sonia Mohnot, a fait une présentation sur le contenu lors du premier webinaire organisé par le CCNDS sur les effets du changement climatique sur l’équité en santé26 (écouter l’enregistrement en anglais).

 

Conclusion

Il va sans dire que s’attaquer aux effets inéquitables du changement climatique pour la santé constitue un défi de taille pour le milieu de la santé publique. Le défi se révèle d’autant plus énorme en sachant que les ressources restreintes du système de santé sont exploitées au maximum pour lutter contre la pandémie de COVID-19.

Pendant que la population canadienne attend avec impatience l’acheminement des vaccins et l’allègement des restrictions, les acteurs de la santé publique ont pourtant une occasion inouïe de prendre part au mouvement grandissant en faveur d’un rétablissement vert et juste de la pandémie de COVID-1935-42. Un tel rétablissement pourrait permettre d’obtenir les fonds nécessaires pour remédier à l’iniquité et bâtir un avenir durable, où tout le monde pourrait se réaliser.

Dans le document Résilience face aux changements climatiques – deuxième partie : rôles et démarches de la santé publique1, il est question plus en détail des moyens proposés aux acteurs de la santé publique pour participer à l’édification de collectivités équitables et résilientes face au changement climatique. En effet, le deuxième mémoire porte sur ce qui se fait en ce moment. Les acteurs de la santé publique peuvent s’en servir dans leur démarche, intégrer les recommandations résumées dans le présent document et intensifier les initiatives collaboratives et axées sur l’équité pour gérer la crise climatique.

Ressources connexes portant sur un rétablissement vert et juste de la pandémie de COVID-19 :

De l’Association canadienne de santé publique :

 

Références bibliographiques

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  6. Lewis, D., Williams, L. et Jones, R. (2020, décembre). A radical revision of the public health response to environmental crisis in a warming world: contributions of Indigenous knowledges and Indigenous feminist perspectives. Revue canadienne de santé publique, 111(6), 897-900. Doi : 10.17269/s41997-020-00388-1
  7. Masuda, J., Lewis, D., Poland, B. et Sanchez-Pimienta, C.E. (2020, décembre). Stop ringing the alarm; it is time to get out of the building! Revue canadienne de santé publique, 111(6), 831-835. Doi : 10.17269/s41997-020-00437-9
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  11. Allen, M.R., Babiker, M., Chen, Y., de Coninck, H., Connors, S.,… van Diemen, R. (dir.). (2018; rév. 2019, janvier). Réchauffement planétaire de 1,5 °C : résumé à l’intention des décideurs, résumé technique et foire aux questions [Internet]. Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat [cité le 18 mars 2021], 26 p. https://www.ipcc.ch/site/assets/uploads/sites/2/2019/09/SR15_Summary_Volume_french.pdf
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